Quand on me demande ce que je fais dans la vie, j'ai systématiquement un moment d'hésitation. C'est une question souvent revenue et le reflet d'une sociabilité de base de celui ou celle qui veut en savoir plus sur toi. Dis moi ce que tu fais, je te dirai qui tu es...
C'est bien là qu'est le problème, si je te dis ce que je fais, tu vas t'imaginer que je suis comme ci ou comme ça, le problème étant que tu vas te tromper. J'aurai beau t'expliquer, tu vas camper sur tes idées reçues et susciter mon énervement contenu.
D'ailleurs, plutôt que de chercher à t'expliquer sachant que tu ne vas pas comprendre, j'en reste à l'énoncé de la profession et je te laisse débiter tes stéréotypes. Plutôt que de te sauver de ta bêtise crasse, je t'y laisse car finalement, mieux vaut économiser son énergie plutôt que de chercher à te changer contre ton gré.
Car en effet, je crois que tout le monde - moi compris - se plaît à ordonner son petit univers selon les représentations qu'il s'en fait plutôt que de confronter ses représentations à la réalité. Tout est beaucoup plus simple avec la pensée pré-mâchée.
Bref, quand le moment d'hésitation devient trop long et laisserait croire que je suis stupide pour n'avoir pas compris une question de base, je lâche le morceau, incapable que je suis d'un quelconque mensonge. Je suis par ailleurs assez peu imaginatif et quelques millisecondes ne suffisent pas à m'inventer une profession neutre qui ne génèrera aucune question de la part de mon interlocuteur.
Deux réactions sont systématiquement observées, totalement inconciliables. Les uns me portent soudainement un regard presque admiratif ; les autres ne marquent que du dégoût. Vous n'imaginez pas à quel point j'ai envie de leur claquer le beignet aux uns comme aux autres. Enfin, après avoir dit merci aux admirateurs tout de même. Restons civilisés.
La réaction se construit en deux temps quand l'annonce est faite devant un groupe, au cours d'un diner par exemple. D'abord ce sont les admirateurs qui tombent en pâmoison, montrent leur intérêts, posent des questions sans vouloir entendre la réponse. Puis ils finissent par se lasser tant que je suis insignifiant au regard de ce qu'ils pouvaient bien s'imaginer.
C'est alors que les méprisants entrent en lice, bien échaudés par les marques d'intérêts manifestées précédemment. C'est avec stoïcisme qu'il faut alors réagir car on ne peut plus compter sur les admirateurs d'autrefois qui ne savent plus quoi penser, pour vous sortir de cette mauvaise passe. Les lâches!
Agir sur ce qui dépend de nous, laisser couler le reste... je laisse couler, merci le stoïcisme.
Mon quotidien c'est l'étude, l'écoute, le silence, l'attente, le stress, l'urgence. Il n'y a aucune raison d'en être fier mais je n'en aurai pas honte. Ma profession ne se résume pas, elle est multiple, il y en a autant de définitions et de pratiques que d'individus qui l'exercent. Il faut le vivre pour le croire et je renonce à l'expliquer.
Sans doute n'est ce là qu'une prétérition...
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